Le spleen de l'épaule

Le spleen de l'épaule

Samedi, Janvier 4, 2025

Trouble organique ou mécanique ?

Non, non, ne partez pas ! Je vais bel et bien parler d’un problème de santé commun et non pas de Baudelaire et son spleen de Paris, bien que le désarroi de notre épaule puisse ressembler à la déprime du quidam parisien et le malaise social dépeint dans ses poèmes.

À cheval entre le 19e et le 20e siècle, Hans Kehr, un chirurgien allemand, popularise l’ablation de la vésicule biliaire et son drainage. Il travaille également sur la rate, spleen en anglais, et observe un lien entre sa rupture et une douleur sur l’épaule gauche. Cette douleur projetée de la rate à l’épaule du même côté sera appelée « signe de Kehr ».

Et depuis, qu’avons-nous appris ?

Le « signe de Kehr » est, depuis, utilisé en médecine également de manière détournée pour évoquer une douleur projetée du foie, de la vésicule biliaire, de l’estomac, du pancréas et même de l’utérus à l’épaule.

À l’exception du problème lié à l’utérus, que je mets de côté pour l’instant, les autres organes cités plus haut ont le point commun de se situer sous la coupole diaphragmatique. Notre puissant muscle de la respiration qu’est le diaphragme est innervé par les nerfs phréniques droite et gauche qui proviennent de la région cervicale et partagent une origine nerveuse identique aux nerfs supra claviculaires qui passent juste au-dessus des clavicules pour innerver la peau de la région des épaules. Comme expliqué dans l’article sur la prostate, il s’agit à nouveau d’un arc réflexe viscéral permettant de projeter une information sensitive douloureuse d’un organe à une région du corps éloignée.

Comment ?

Dans le cas de notre épaule, le trouble organique provoque une irritation du diaphragme qui lui-même transmet un signal douloureux en passant par le nerf phrénique du côté irrité jusqu’à l'épaule via le nerf supra claviculaire.

Ci-dessus, vue de face du diaphragme

Ci-dessus, vue schématique de face de l'innervation du diaphragme

Ci-dessus, vue schématique de face de l'innervation du diaphragme

Et pour l’utérus ?

Dans certains cas particuliers d’endométriose (maladie gynécologique caractérisée par la présence de cellules de la muqueuse utérine en dehors de l’utérus), un amas de cellules anarchiques utérines peut se retrouver sous la coupole diaphragmatique, donc bien loin de son point de départ, l’utérus. Cette présence anormale pourrait alors irriter le diaphragme et créer un « signe de Kehr », c’est-à-dire une douleur projetée à l’épaule depuis la coupole du diaphragme et causée par une pathologie de l’utérus.

En conclusion, et dans un contexte évoquant un trouble organique hors pathologie nécessitant un traitement médical ou alors avec l’accord du médecin, il est important de traiter le diaphragme en cas de douleur des épaules. La contracture musculaire du diaphragme liée à des substances inflammatoires issues de l’irritation peut être soulagée grâce à des techniques d’étirement et de massage de notre muscle principal de la respiration. De même que l’irritation favorisera une accumulation de liquide dans l’abdomen, un drainage en profondeur sous la coupole diaphragmatique peut soulager les symptômes douloureux des épaules.

« J’ai la rate qui s’dilate… »

On connait la chanson, mais pas forcément le rôle important de cet organe. Notre rate n’est pas vitale, mais sans elle la qualité de vie est diminuée. Notre système immunitaire bénéficie de sa fonction de « coach » pour les globules blancs afin de mieux résister à certaines bactéries. Mais avant tout, elle filtre nos globules rouges et détruit ceux qui ne sont plus en bon état. Sans oublier sa fonction de réservoir à plaquettes pour la coagulation. La rate filtre 1,5 litre de sang toutes les dix minutes, en étroite coopération avec son grand frère le foie.

8 centimètres d’ingénierie biologique que l’on peut soigner en réflexothérapie ou par le massage. Les traitements de thérapies manuelles pour les organes sont pratiqués depuis l’antiquité et permettent un soutien efficace pour la santé.

« Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille ! » Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal.

À votre santé !

Thomas Payot

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