La triade (mal)heureuse

La triade (mal)heureuse

Jeudi, Décembre 19, 2024

Fascia thoracolombaire, respiration et épaules (hernie discale lombaire, suite)

Voici ce que j'écrivais dans l'article du 11 décembre 2024 sur la hernie discale lombaire :

Préférez un renforcement global du corps à un ciblage de la zone abdominale. Pour des raisons de dynamique posturale, ventilatoire et de compression en réseau continu musculosquelettique, il vaut mieux miser sur une répartition harmonieuse du tonus que sur un renforcement d’une seule zone. Une cathédrale devient millénaire grâce à une bonne répartition des contraintes. C’est la même chose pour le corps humain. Bref, ne nous égarons pas et gardons à l’esprit que de bonnes jambes et de bonnes épaules, tout comme un tronc tonique, permettent une répartition optimale d’une charge au niveau des lombaires.

C'est donc sur ce sujet complexe que je souhaite m'attarder aujourd'hui, en espérant toujours ne pas m'égarer et rester simple, sans être simpliste, afin que vous finissiez votre lecture avec une image claire d'un aspect fonctionnel de votre corps, ainsi qu'une bonne compréhension d'exercices efficaces et faciles à faire. C’est aussi une occasion de faire un lien avec la salutogenèse et son principe de compréhension (voir l’article à ce sujet : AVC et salutogenèse). En effet, certains patients ont besoin de comprendre, de visualiser le fonctionnement de leur corps, afin d’entreprendre des changements bénéfiques.

J’ai également l’opportunité à la fin de cet article un peu technique, mais bien concret, de répondre à une autre question fréquente : « Quel est la différence entre l’ostéo, le masseur médical et le physio ? ». C'est parti !

Nous allons aborder la dynamique posturale, ventilatoire et de compression en réseau continu musculosquelettique à travers le fascia thoracolombaire, le caisson abdominal et son diaphragme, ainsi que les épaules.

Le fascia thoracolombaire est une enveloppe de tissu conjonctif entourant les muscles dorsaux de la cage thoracique aux fessiers en passant par les lombaires. Il enveloppe également les muscles abdominaux.

En anglais, tissu conjonctif se dit "connective tissue".  Le fascia thoracolombaire met donc en relation directe, en les enveloppants, la région du bassin et des épaules en passant par les lombaires et les muscles abdominaux. Vous commencez à comprendre peut-être son rôle de support et de mise en relation, "en connexion", des structures les unes aux autres.

À ce stade, et avant de continuer sur le caisson abdominal, je vous propose de visionner cette courte vidéo qui schématise très bien mes propos.

À présent que vous visualisez le fascia thoracolombaire et sa mise en relation direct du bassin, et même des jambes via le fascia lata mentionné dans la vidéo, avec les épaules, nous allons compléter cette image avec le caisson abdominal.

Le caisson abdominal, qui comprend évidemment les muscles abdominaux, eux-mêmes enveloppés par le fascia thoracolombaire, est délimité vers le haut par le diaphragme, muscle principal de la respiration...et là, vous commencez déjà à entrevoir le rapport entre posture et respiration. Non? Alors je continue.

Un diaphragme souple et puissant, c'est-à-dire entraîné par une activité aérobique régulière, comme la marche active, garde un tonus adapté à votre morphologie ne générant, ni affaissement, ni redressement exagéré de la cage thoracique.

Le diaphragme est terriblement influencé par notre stress et la sédentarité. Certaines personnes gardent une respiration haute en permanence, creusant les lombaires et les cervicales, et d'autre une respiration basse et s'avachissent.

Première leçon : la marche active étire et renforce votre fascia thoracolombaire (ainsi que tous les muscles y correspondant) et votre diaphragme pour une meilleure ventilation et une meilleure posture.

Lors de la marche, n'hésitez pas à bien déverrouiller la colonne vertébrale et favoriser la mouvement controlatéral jambes-bras, c'est-à-dire bien balancer votre bras droit en avant pendant que votre jambe gauche s'avance, et vice-versa. C'est  ce mouvement principalement qui étire et renforce votre fascia thoracolombaire.

Quid des épaules ? Après cette première partie, qui j’espère vous aura permis de vous construire une image dynamique et fonctionnelle de votre corps, nous allons apporter un élément supplémentaire important concernant la répartition des contraintes et des compressions posturales et ventilatoires.

Grâce au fascia thoracolombaire, une surcharge lombaire favorisant une hernie discale peut être soulagée à partir des épaules en les assouplissant et en les renforçant.

Le système de compression en réseau continu offert par le tissu conjonctif, soit le fascia thoracolombaire dans ce cas, permet de soutenir, oui, c’est bien ça, de soutenir les lombaires via nos épaules. Des épaules fortes et souples soulagent tout notre dos. Idem au sujet de jambes fortes et souples via le fascia lata, souvenez-vous, qui est une prolongation du fascia thoracolombaire au niveau des hanches. Tout est lié ! Merci qui ? Merci au tissu conjonctif ! Véritable gaine dynamique de notre corps.

Quid du rapport entre la respiration (diaphragme), les épaules et le fascia thoracolombaire ? La triade (mal)heureuse.

Il est bien connu des personnes qui souffrent de problème respiratoire de type BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive) que la position du cocher ou du gardien de but, c’est-à-dire l’appui des coudes ou des mains sur les jambes, le dos droit (posture), permet le relâchement des épaules et donc une meilleure respiration (illustration en fin d'article).

À contrario, des épaules tendues, raides et faibles sont une charge supplémentaire pour le corps, tandis qu’un bon tonus musculaire et de la souplesse favorisent le mouvement, le relâchement, la respiration, diminue les contraintes et absorbent les compressions de manière efficace et globale.

La triade fascia thoracolombaire (incluant le caisson abdominal), respiration (diaphragme) et épaules permet de répartir des compressions sur tout le corps, telle une cathédrale millénaire. Il s’agit d’une clé de compréhension pour appréhender différents troubles musculosquelettiques, comme la hernie discale (et organiques, mais c’est un autre sujet). Elle donne des éléments d'analyse, non exhaustifs, mais qui ont fait leurs preuves.

J’en vois au fond de la classe qui se sont endormis, alors passons aux exemples d’exercices pour renforcer les épaules.

En position assise ou debout le dos droit, mais pas en extension, ne pas creuser les lombaires, lever les bras tendus au-dessus de la tête et faire des petits mouvements en avant et en arrière ou de droite à gauche. Plier les coudes et les abaisser sur les côtés jusqu'à angle droit et les remonter en tendant les coudes. Si nécessaire, rajouter des poids légers dans les mains. Étirer les bras et les épaules derrière le dos en joignant les mains, idem au dessus de la tête et en avant du thorax. Durant ces mouvements, respirer amplement en inspirant pas le nez et en expirant par la bouche.

Plus l'âge avance, plus notre musculature se décharne et les bras tombant deviennent une charge pour nos épaules, d'où l'intérêt de les lever pour lutter contre les effets de la gravité et du temps. L'afflux de sang dans les épaules durant ces exercices est primordial pour un bon tonus et une bonne qualité myofasciale (muscle et tissu conjonctif).

Pour terminer mon propos et répondre à la question du début : « Quel est la différence entre l’ostéo, le masseur médical et le physio ?". Voici un exemple dans ce cas de hernie discale lombaire.

L'ostéo pourrait décomprimer l'espace intervertébral sur différents étages de la colonne, le physio pourrait traiter en local la douleur et la zone de la hernie et travailler sur des exercices de réhabilitation et le masseur médical pourrait traiter le fascia thoracolombaire et les muscles des épaules, de la respiration et du caisson abdominal.

Une approche multidisciplinaire est toujours possible. L'essentiel est de déterminer quel est le meilleur traitement pour le patient, avec sa participation active, de l'enthousiasme, de l'assiduité et de bons résultats.

Votre santé vous remercie pour le temps que vous lui accordez.

Thomas Payot

Ci-dessous, les positions du cocher et du gardien de but (images provenant de la ligue pulmonaire suisse, www.liguepulmonaire.ch).

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